TOP
Image Alt

Contre nature

Douanier Rousseau - Deux lions à l'affut dans la jungle

Pour un environnementalisme non spéciste

La remise en cause du spécisme questionne les objectifs de l’écologie ; la prise en compte des intérêts des êtres sentients de la planète permettrait une évaluation claire des dommages causés « à l’environnement » et constituerait donc une boussole précise pour l’avenir.


Conférence animée par Yves Bonnardel, dans le cadre de la première édition de la Semaine de la pensée antispéciste à Rennes (Mars 2019).

*          *

*

 

L’écologie telle qu’appréhendée aujourd’hui est fondamentalement spéciste : elle consiste soit en un humanocentrisme (on considère l’environnement de l’Humanité), soit un écocentrisme (approche centrée sur « la Nature » ou sur les écosystèmes, comme s’ils avaient une valeur « en soi ») ; elle ne considère jamais les êtres sentients comme ayant véritablement, eux, une valeur en soi, au même titre que les humains, et dont l’environnement doit donc lui aussi être pris en compte si l’on veut leur garantir de bonnes conditions de vie.
La remise en cause du spécisme questionne donc les fondements même de l’écologie traditionnelle, pour faire valoir des environnementalismes multiples, celui des humains n’offrant qu’un cas particulier parmi d’innombrables autres. Au-delà des difficultés « techniques » que génère cette multiplication des environnementalismes, la prise en compte des intérêts des êtres sentients de la planète peut constituer un mode clair d’évaluation des dommages causés « à l’environnement » et donc une boussole précise pour l’avenir.

 

 

Voici le commentaire de résumé de @raimonsabater posté en 2022 sous la vidéo youtube :

Merci Yves et aux bénévoles ayant rendu cette conférence disponible. Le contenu permet de déconstruire nombre d’idées reçues et des intuitions sur l’écologie et qui, dans les faits, vont à l’encontre de la prise en compte des intérêts des individus animaux. Le biais naturaliste y est bien exposé.
Je traite ci-après les points qui m’ont le plus marqué, si cela peut apporter un aperçu pour ceux qui pourraient visionner cette conférence/débat, ainsi que pour ouvrir des échanges en commentaire 🙂

* L’animalisme (et l’anti-spécisme) n’a pas de rapport direct avec des concepts véhiculés par l’écologie, comme la préservation des espèces, de l’environnement, des écosystèmes, des biotopes, des dynamiques évolutives, ou autres projections humaines sur la dite nature.

* L’animalisme procède d’une éthique, alors que l’écologie le ferait d’une technique. Cette dernière a une valeur instrumentale, et importe dans la mesure où, au sein des environnements où les individus animaux évoluent, ceux-ci peuvent ressentir des expériences positives et négatives.

* Ramener l’écologie à la question de la sentience est un vrai combat politique, qui pourrait prendre plusieurs formes (dont l’écologie sentientiste). Le critère fondamental de l’éthique est la sentience.

Même dans l’écologie éco-centrée, les animaux ne sont pas moralement considérés.

* Malgré le grand progrès de la discipline scientifique qu’est l’éthologie cognitive, les animaux continuent à être assimilés à la notion de nature, dans une logique où seules les espèces comptent. Ce qui invisibilise les individus qui les composent, en les rendant interchangeables, tels des rouages dans le fonctionnement de la dite nature.
On dénonce plutôt que les océans sont vidés, mais pas les souffrances infligées aux individus animaux marins.

* Dans la dite nature, il y a l’idée d’une détermination naturelle. Alors que les humains sortiraient de ce cadre: leur liberté vient de la capacité d’auto-création (société, culture, etc.).
Il existe une opposition entre les animaux (monde de la matière) et les humains (monde de l’esprit).

* Le caractère spéciste de l’humanisme reste encore bien caché, malheureusement.
Dieu aurait été remplacé par l’idée mystique de nature, où aller contre-nature a une portée prescriptive. Dans nombre de luttes sociales, ce rapport à la nature doit être déconstruit (ex: l’homophobie).

* La complexité de la vie, ou de la sensibilité, n’est pas synonyme de sentience. Les individus ont des intérêts et préférences, mais pas les espèces ou les populations.



Contre nature ne partage pas nécessairement le point de vue de ses contributrices et contributeurs. Si vous souhaitez critiquer, développer ou échanger sur cet article, n’hésitez pas à le faire sur notre page Facebook et notre compte Twitter. Pour proposer un texte pour publication, prenez connaissance de nos directives de publication puis contactez-nous.



Abonnez-vous à notre newsletter

    Yves Bonnardel a écrit de nombreux articles sur le naturalisme, ainsi que La Domination adulte (Le Hêtre-Myriadis, 2015). Il a également co-écrit Solidarité animale (La Découverte, 2020) et co-dirigé La Révolution antispéciste (Puf, 2018).

    Cofondateur de la revue Les Cahiers Antispécistes en 1990, il a écrit de nombreux articles d'analyse du naturalisme et de l'essentialisme inhérents à l'écologie mainstream ainsi qu'aux différents hiérarchismes.